Vaste résolution

Nouvelle année et nouveaux défis, nouvelles décisions et nouveaux objectifs, nouveaux rêves et projets nouveaux ; on s'imagine une vie meilleure, plus sage, plus saine, plus cigale que fourmi, moins de cigares moins de fumée ; une année plus résolue et plus studieuse, une année moins stressante et moins adipeuse, moins connectée et moins sérieuse ; une année avec plus de sexe mais — ô paradoxe — plus de temps pour soi ; une année avec moins de sucreries mais plus de douceur, davantage de sport et moins de bobos ; une année avec moins d'effort mais plus de réconfort – cherchez l’erreur.



On rêve d’une vie moins connectée et moins sérieuse ; une année avec plus de sexe mais — ô paradoxe — plus de temps pour soi.



Pleine conscience et une fois les excès de l’an passés, on se promet davantage de partage et moins de matérialisme, plus de rangements mais moins de tri ; on rêve d'une vie parfaite, on revoit ses assurances mais on supprime sa complémentaire – cherchez l’erreur.


Mais à force, les belles promesses se frottent à la réalité. Angela Metzger – coach en santé personnelle, scientifique du sport et CEO de SalutaCoach – dans le Migros Magazine : « L’escalator du centre commercial est plus facile à trouver que la cage d’escalier, le canapé plus accueillant que les chaussures de running. Comme l’être humain est habitué à gérer ses ressources avec parcimonie, nous optons souvent inconsciemment pour une solution qui nécessite peu d’énergie. D’ailleurs il faut 66 jours pour changer, durablement, ces habitudes. »


Pan.


Au moment de lire ces lignes, mi-janvier, d'aucuns auront commencé leur Dry January, entamé la cure Veganuary, songé au février sans supermarché, d’autres n’auront cédé à la tentation du jeudredi qu’à quelques reprises — un petit écart, ça compte ? —, les autres auront accepté – sacrifice ultime! – une livraison groupée sur Zalando, les derniers auront tenu bon jusqu’en février, V comme victoire ou V comme Veganuary.


Mais très vite tout s’écroule. Horreur ! Embuscade ! Guet-apens ! Patatras ! A la première tentation tout chute: effroi, consternation, ras-le-bos, une embûche et ping: rechute — adieu les kilos perdus, salut l'abandon de la clope, on remettra ça à 2025. Éventuellement.


D'aucuns auront commencé leur Dry January, entamé la cure Veganuary, songé au février sans supermarché, d’autres n’auront cédé à la tentation du jeudredi qu’à quelques reprises — un petit écart, ça compte ?


Simon* y pense alors, ressasse les efforts consentis, tout ça pour ça, tout ça pour rien ; il remugle, il peste, il râle : « quel incapable je fais », mais au moins a-t-il a appris : il a appris que non, les résolutions ce n’est pas pour lui mais que oui, les résolutions c’est utile pour apprendre à (mieux) échouer, cela l’aide à se recentrer, à accepter, à tolérer, à ne plus s’y faire prendre, à comprendre que ces satanées résolutions tant pis, au diable l’effort.


Pris bon an mal an, entre deux excès ou deux shots de trop, la résolution est ce marronnier des temps modernes, entre performance ou réluctance.


L’année prochaine justement, il étrennera, à ses potes d’enfance les plus bourrus, ceux-là mêmes, terriens rabougris pour qui le progrès passe par l’UDC, il dira, tout affable et sans gêne : « les résolutions, pour quoi faire ? » ; un contexte plus tard il jubilera l’alternative aux caciques de la Protection-Civile ou de l’armée, ceux-là pour qui progresser c’est grader : « les résolutions ne n’en fais pas car je ne les tiens pas. »


Les résolutions, certains les tiennent comme on promet fidélité, une tentation sous le poids des excès et c'est la dégringolade.


D’autres s’y tiennent, cravachent, souffrent, se durcissent.


Tout ça pour quoi, finalement ?


*prénom d’emprunt

 

 

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La résolution, terre de performance ou de réluctance.

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